
Essayer de faire croire aux autres que nous pensons, agissons ou éprouvons de façon différente de ce que nous ressentons, faisons ou considérons réellement n’est pas une tactique nouvelle. Il est probable qu’elle existe depuis les premiers temps de l’humanité. Et nous continuons à y avoir recours chaque fois que nous estimons que la vérité, si elle était connue, nous desservirait. Nous nous cachons alors avec le sentiment de nous protéger, parfois même de nous sauver, ou simplement de faire preuve d’habileté. En tous cas, d’y être gagnant.
Mais est-ce si sûr ? Sommes-nous réellement bénéficiaires de cette mystification ? Au delà de l’effet immédiat, la façon dont la relation avec notre interlocuteur évolue après ces feintes, mensonges ou silences, nous est-elle si profitable ?
Ma conviction est que, tout au contraire, la plupart des difficultés que nous connaissons dans nos échanges vient de nos tentatives de dissimulations. Parce que ce qui se construit ensuite est en partie irréel, donc faussé. Et de ce fait fragile, comme un édifice aux fondations sans fermeté qui ne tiendra que grâce à la multiplication des étayages et ne manquera pas de s’effondrer un jour ou l’autre, presque toujours en faisant des victimes. À l’inverse, je crois qu’en faisant de moins en moins semblant, nous nous épargnerions bon nombre de désagréments.
Mais cela nous fait peur, au point de nous amener à penser que ce n’est pas possible. Nous avons le sentiment que, si nous laissions nos interlocuteurs nous voir tel que nous sommes « pour de vrai », ils accepteraient moins nos propositions ou nos demandes, voire les refuseraient. Plus grave : ils se serviraient à nos dépens de ce que nous estimons des faiblesses ou des vulnérabilités. Certains en abuseraient pour nous manipuler et parfois nous blesser. Plus profondément encore : ils nous apprécieraient moins et peut-être même ne nous aimeraient plus.
Nous voici donc écartelés entre deux pôles opposés.
Au final, nous craignons que faire moins semblant ne soit qu’une utopie à laquelle nous ferions mieux de renoncer, malgré le mal que nous avons à nous résigner à ce que les rapports avec les personnes que nous rencontrons, dans notre vie privée, publique ou professionnelle, ne soient, trop souvent, que des jeux de dupes.
Je ne m’y résigne pas non plus. Et je soutiens que retirer ses masques et montrer son vrai visage est non seulement avantageux mais possible.
Mon propre désir d’aller dans cette direction et les formations à une communication différente que j’ai animées pendant des années pour des professionnels du soin, m’ont amené à étudier de près cette question. En plus de mes expériences personnelles et de mes recherches, mes très nombreux échanges avec les participants m’ont permis de mieux comprendre ce qui se joue dans les rapports humains et de valider plusieurs hypothèses. J’ai également pu vérifier concrètement l’efficacité du choix de la transparence et constater le mieux-être qu’il apporte.
Mais j’ai aussi pu observer la puissance des freins qui s’opposent à ce projet.
Pour permettre à ceux qui le souhaitent de faire ce que j’appelle le pari de la sincérité et de réunir toutes les chances de le gagner, j’ai conçu un cheminement en deux grandes étapes.
La première examine pourquoi faire moins semblant est profitable. Son objectif est d’apporter des arguments qui confortent cette option et réduisent le poids des objections qui en dissuadent.
Elle envisage successivement :
· Pourquoi la dissimulation n’est pas la solution mais la source de beaucoup de nos problèmes relationnels ;
· Pourquoi nous nous cachons aux yeux des autres et pourquoi nous exagérons souvent les risques que nous supposons si nous le faisions moins ;
· Pourquoi il est intéressant de miser sur la franchise, autrement dit, ce que l’on gagne à être plus sincère.
La seconde étape, essentiellement pratique, explore comment cesser, progressivement, de faire semblant.
Elle suggère :
· Comment devenir davantage conscient des ressentis physiques et émotionnels qui émergent en nous avant d’envisager de les exprimer, mais aussi comment mieux se rendre compte des mille et une façons dont nous nous cachons : c’est la sincérité avec soi-même ;
· Comment se faire une idée de ce que l’on attend de l’échange avec l’autre pour l’assumer plus facilement lors de la rencontre, le laisser se manifester et augmenter nos chances de l’obtenir ;
· Comment, pas à pas, s’y prendre concrètement avec un vis-à-vis : véritable mode d’emploi de la sincérité ;
· Comment faire des inévitables ratages des opportunités pour avancer sur la voie de la franchise.
À chaque étape, j’évoque de nombreux exemples, propose des exercices et suggère des entraînements ainsi que des tentatives graduées.
Ce cheminement, j’ai eu l’occasion de le tester auprès de milliers de participants. Constatant les améliorations qu’ils me disaient en retirer, tant sur le plan professionnel que personnel, j’ai souhaité le proposer à un large public de particuliers et j’en ai rédigé cette présentation. Je souhaite très sincèrement qu’elle vous apporte le mieux être que vous en attendez et peut-être quelques bonnes surprises supplémentaires.
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C'est un peu comme quand on va faire la planche pour la première fois. Des personnes bien intentionnées ont beau nous assurer qu'on ne courre aucun danger, les scientifiques peuvent nous expliquer que la densité de notre corps et son volume, comparés à la structure de l'eau, font que nous allons flotter : on ne peut pas tricher avec ses appréhensions. Et il faut du temps avant d'arriver à s'étendre à la surface, sans mouvement et sur le dos, pour constater par soi-même que, oui, c'est incroyable, on est porté, on ne se noie pas. Encore un peu de temps et on parvient même à y trouver du plaisir.
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Table des matières
Première partie
Pourquoi miser sur la franchise ?
Chapitre 1 – Faire semblant n’est pas la solution, c’est le problème.................................................. 11
Que faire, alors ?..................................................................... 12
Une fausse solution................................................................... 13
Un remède pire que le mal......................................................... 19
Chapitre 2 – Pourquoi nous cachons-nous ?............................ 27
L’origine de nos peurs................................................................ 28
Chapitre 3 – Pourquoi ça vaut le coup d’être sincère............. 47
Mes premiers pas..................................................................... 48
Mieux vivre avec les autres......................................................... 52
Mieux vivre avec moi-même....................................................... 64
Deuxième partie
Comment faire moins semblant ?
Chapitre 4 – D’abord, être sincère avec soi............................. 79
Premier moyen : Le balcon intérieur.............................................. 80
Deuxième moyen : La projection privée......................................... 85
Troisième moyen : La collection de masques................................... 86
Chapitre 5 – Présager quelques ressentis................................. 93
Pressentir ce que l’on éprouvera.................................................. 94
S’attendre à ce que l’on attendra................................................. 95
Chapitre 6 – Sincérité : mode d’emploi .................................... 133
Faire preuve de tact.................................................................. 134
Choisir le bon moment.............................................................. 139
Respecter la posologie.............................................................. 140
Se ménager............................................................................ 144
Personnaliser son expression....................................................... 149
Laisser voir sa vulnérabilité......................................................... 158
Chapitre 7 – Ratages et trébuchements : y voir des opportunités.......................................... 163
Des occasions manquées........................................................... 163
Des dérapages........................................................................ 164
Des embrasements................................................................... 166
Conclusion – Ma conviction....................................................... 185
Bibliographie.......................................................................... 189

NAGER AVEC LE COURANT
En 2008, les Editions Dangles ont édité ce second livre. J'y présentais le fruit de ma recherche sur la question du sens. Elle était apparue lors de mon travail avec des médecins, lorsque ceux-ci m'avaient fait part d'une question que leur posaient de plus en plus souvent leurs patients, à propos de la maladie ou de la blessure dont ils souffraient : pourquoi cela m'arrive-t-il ? n'attendant pas seulement une réponse sur les causes physiques de leur problème (une intoxication, un accident, un cancer...) mais un éclairage sur la signification, peut-être même la finalité de cette "péripétie" de santé. Autrement dit, pour quoi plutôt que pourquoi. Les médecins me demandaient : que peut-on répondre à ces personnes ? Dégager en touche parce que ce n'est pas notre domaine ? Les adresser à un psy ? Leur prescrire des antidépresseurs ? Leur donner notre interprétion?
Ne trouvant dans les livres aucune réponse que je puisse transmettre à ces soignants, j'ai entrepris moi-même de l'élaborer, et cela m'a pris une quinzaine d'années.
J'ai d'abord recherché pourquoi trouver du sens à ce qui lui arrive est un besoin vital pour l'être humain, puis de quels moyens il dispose pour y parvenir. J'en ai identifié quatre, assez différents les uns des autres, qui se mettent en place "naturellement" au cours du développement de la personne et qui lui permettent d'aborder des situations de plus en plus complexes, en apparence de plus en plus étranges, absurdes ou révoltantes. Mais il arrive souvent que l'un de ces moyens n'ait pas pu se développer et que cela laisse la personne démunie et désemparée lorsque des événements déstabilisants surviennent dans sa vie.
Partant de ces observations, j'ai cherché comment permettre à ces personnes d'avoir accès à ces "outils du chercheur de sens" qui leur faisaient défaut.
J'ai testé les démarches que j'ai imaginées avec l'aide de médecins et d'infirmières. Constatant leur efficacité, je les ai proposées à des personnes confrontées à des difficultés d'autres ordres que de santé (conjugales, professionnelles, relationnelles) et ils se sont montrés aussi opérants.
Je les présente dans ce livre.
Ces 2 livres (et "Je ne veux plus faire semblant") sont commandables sur les sites suivants :
http://livre.fnac.com/a6663559/C-Du-Mottay-Je-ne-veux-plus-faire-semblant

QU'EST-CE QU'ON ATTEND ?
Réinventer l'être humain plutôt que se résigner
Publié en 1997 par Wern Edition, j'ai rassemblé dans cet essai un certain nombre de réflexions nées de mon constat que la société dans laquelle nous vivons n'accorde pas un grand prix aux hommes qui la composent. J'ai tenté d'en identifier les causes, en m'appuyant sur les travaux de divers chercheurs en sociologie, en psychologie, en éthnologie, mais aussi en astrophysique et en physique quantique, ou encore en spiritualité. J'en suis arrivé à identifier que l'origine du problème est la méfiance que nous éprouvons vis-à-vis de la nature humaine, en nous et chez les autres. Et j'ai avancé quelques pistes de revalorisation de l'image que nous nous faisons de l'homme, à la fois individuellement et collectivement.
Voici le texte de la quatrième page de couverture :
"Nous vivons dans une société qui se comporte exactement comme si elle n'aimait pas les hommes. Mais ne serait-ce pas l'homme lui-même qui ne s'aime pas beaucoup ? Sans quoi nous ne gâcherions pas ainsi la vie.
Avant de nous résigner à une société qui se développe en dépit de nous, il est urgent de se demander si l'homme vaut le coup ou si l'on a raison de s'en méfier."
De septembre 2005 à mai 2008, j'ai été associé à la démarche Mosaïques, financée par le Fonds Social Européen, avec pour mission de mieux comprendre les composantes de la pénibilité du travail des professionnels qui s'occupent de personnes dépendantes. Mon travail s'est concentré sur les difficultés relationnelles qu'ils rencontrent.
À l'occasion de deux colloques présentant les travaux de la démarche Mosaïques, deux petits guides ont été distribués aux parcticipants et diffusés plus largement.

Petit guide pour
Mieux comprendre et Mieux s'y prendre dans
les aspects relationnels des Services à la Personne
Le premier, publié en 2007 et en partie co-écrit avec Daniel Cote-Colisson, explique la nature des enjeux qui sous-tendent toutes les relations entre des êtres humains en les illustrant d'exemples dans le domaine des soins et des services à la personne dépendante. À leur éclairage, il propose aux professionnels d'analyser les difficultés ou tensions qu'ils rencontrent avec ceux dont ils s'occupent et leur suggère des pistes pour prévenir ou résoudre ces difficultés.

Petit guide pour
Mieux comprendre et Mieux s'y prendre
dans la traversée des épreuves
dans les métiers de service à la personne
Le second, édité en 2008, traite des épreuves relationnelles que les aidants professionnels sont assurés de connaître : deuils, séparations, culpabilité, doute, fortes tensions, crises... Pour éviter d'être broyés par ces épreuves sans se réfugier dans l'indifférence, ce petit guide leur suggère des façons de s'y préparer et de s'assurer que leur traversée s'accomplit pleinement. C'est la condition pour que ces épreuves non seulement ne les brident pas ou, pire, ne les bloquent, mais qu'elles deviennent nourrissantes pour eux et renforcent leurs compétences à la fois techniques et relationnelles.